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1. Le début de la fin. Acte II.



1. Le début de la fin.

Acte II : La réunion de pré-rentrée.

 

 

Tony et Ed arrivèrent au réfectoire, accompagnés des CPE. Les deux garçons convinrent d'aller s'asseoir plutôt dans les derniers rangs, au cas où la réunion deviendrait assez chiante pour provoquer leur somnolence… Les CPE s'assirent sur l'estrade, aux côtés de monsieur Vandeputte, de madame Bretelle et de la nouvelle principale, madame Hachiche.

Tony se boucha les oreilles quand les sifflements du micro vinrent lui faire perdre quelques dixièmes : monsieur Vandeputte faisait des essais ; sans succés – Punaise !

Ed, allumant son téléphone portable – C'est marrant, hein ! Même quand ils ne gueulent pas, ils nous cassent les oreilles !

Tony – Ouais…

Charlène, une des femmes de la cuisine – Salut les garçons ! Alors, ces vacances ?...

Ed – Trop courtes ma bonne dame ! Trop courtes !

Charlène, l'air dépité – A qui le dis-tu !...

Ed, rictus incontrôlé – Je parlais des vacances !... Pas d'ambigüités, hein ?!...

Monsieur Vandeputte, absorbé par ses essais micro – Une, deux… une, deux… Bon, je crois que ça marche, cette fois ! – Rires de l'auditoire - Bon, alors : nous allons commencer la réunion de prérentrée dès que les derniers professeurs se seront installés…

Tony, à Ed – C'est bizarre… regarde la tête que font les chefs…

Ed, en plein jeu sur son téléphone – Attends ! Tu vas me faire perdre ma partie !...

Tony, étonné – Hein ?... Mais qu'est-ce que tu fais ?

Monsieur Vandeputte, fixant d'un regard contempteur Anna et Johanna, les dernières à arriver – Bon… on va attendre que les surveillants se soient enfin installés avant de commencer la réunion !

Tony, mal à l'aise à force d'empathie – Ca craint !

Madame Montagné, assise juste devant, à un autre prof – C'est encore la Vie Scolaire ! Les surveillants font ce qu'ils veulent de toute façon…

Ed, à Tony, sans quitter l'écran de son téléphone – Comme salope, celle-là, elle se pose là !

Tony, pris de frayeur – Chuut !...

Monsieur Vandeputte – Bon, maintenant que les présentations sont faites, surtout pour les nouveaux venus, je vais laisser le micro à la principale, madame Hachiche.

Madame Hachiche, dans un beau tailleur marron caca – Eh bien… je vais commencer par vous dire : bonjour !

Ed, fugace – Oh là ! Etonnant !

Madame Hachiche - Je me présente : madame Corine Hachiche… euh…

Ed, exaspéré – Elle redit à la lettre ce que Vandeputte vient juste de nous dire ! J'ai l'impression qu'elle est brillante, celle-là aussi !...

Madame Montagné, daignant à peine se retourner – Chuut ! Il y en a qui aimeraient écouter !

Monsieur Vandeputte - …bon : maintenant que nous avons fait les présentations, nous attendons vos suggestions concernant ce que vous aimeriez voir changer cette année… - Silence de l'assemblée dans laquelle tout le monde se regarde avec une drôle de tête - Des suggestions ?

Madame Montagné, droite comme un i – Oui ! Je trouve qu'on ne voit pas assez les surveillants dans les couloirs pendant les intercours. Or, c'est à ce moment que les élèves changent de classe et il n'y a personne pour veiller à leur sécurité ! Et ça, c'est dangereux ! – Acquiescement d'une partie de l'assemblée.

Ed – Oh la pute !

Tony, effrayé – Chut !

Madame Bretelle, d'un hochement de tête – Tout à fait ! S'il arrive quelque chose aux élèves, il n'y a personne pour intervenir !

Monsieur Dufour – Alors moi, je veux bien affecter des surveillants dans les couloirs mais il me semble que pendant les intercours les professeurs peuvent sortir de leurs classes, ne serait-ce que pour veiller à ce que les élèves se rangent avant d'entrer en cours !

Madame Montagné, agacée – Mais vous ne vous rendez pas compte que pendant les intercours nous avons besoin de souffler un peu !

Monsieur Dufour, agacé à son tour – Non mais attendez ! Pendant les cinq minutes que durent les intercours, je crois que vous pouvez aussi rester sur le pas de porte… ce qui n'empêche pas aux surveillants de tourner dans les couloirs…

Madame Montagné – Alors voilà ! Chaque fois qu'on propose de donner des tâches aux surveillants, ça se retourne contre nous ! Si c'est comme ça, je ne vois pas pourquoi participer à cette réunion!

Monsieur Dufour – D'abord, ce ne sont pas des surveillants mais des assistants d'éducation…

Madame Montagné, piquante – Oui ! Mais ça ne change pas leurs diplômes !...

Ed – Oh la pute !

Tony, congestionné de peur – Mais chut ! Elle va finir par nous entendre !

Monsieur Dufour – Très bien : je veux bien entendre qu'avec un concours de catégorie A certains professeurs aient envie d'avoir à leur disposition des personnes pour effectuer toutes les basses corvées mais je crois que l'éducatif, c'est le domaine de tout le monde !

Monsieur Vandeputte, coupant court à la conversation – Bon, on n'est pas là pour polémiquer ! Madame Montagné, vous pouvez être sûre qu'il y aura, cette année, des surveillants dans les couloirs à chaque intercours !... D'autres suggestions ?

Monsieur Manin, prof de Français – Oui, tout à fait ! Je voudrais me faire en quelque sorte le porte parole d'une majorité des professeurs : maintenant que les cours vont reprendre  dès treize heures pour les élèves de quatrième et de troisième, il serait souhaitable que les assistants d'éducation fassent régner le silence dans la cour de récréation !

Madame Sauzéon – Mais attendez ! Comment voulez-vous que deux surveillants fassent régner le silence dans une cours de récréation où 400 élèves s'amusent ? Vous vous rendez compte de ce que vous demandez ?

Monsieur Dufour – Sans compter que la pause méridienne est le seul vrai moment de détente pour les enfants ! Je vous rappelle que la cour est un endroit de récréation ! Non seulement les assistants d'éducation n'arriveront jamais à faire régner le silence, comme le souligne ma collègue, mais en plus je peux vous assurer que ça va mal se passer !

Madame Montagné – Il faut un peu d'autorité, c'est tout !

Ed, sous le regard exaspéré de Tony – Non mais quelle pute ! J'en reviens pas !

Madame Bretelle – Il me semble qu'on ne peut pas faire respecter le silence dans une cour ! C'est une question de bon sens !

Monsieur Dufour – Mais bien sûr !

Madame Sauzéon – Et puis je ne sais pas s'il serait bien intelligent de mettre les élèves sous pression neuf heures par jour ! Ils ont besoin de décompresser !...

Monsieur Manin, indigné – Oui, donc on laisse faire !...

Madame Montagné – De toute façon, ce collège va à vau-l'eau !

Monsieur Dufour – Attendez ! On ne va pas commencer ! C'est la rentrée, nous allons essayer de faire de notre mieux en sachant qu'à un moment de l'année, il y aura plus de problèmes qu'au premier jour…

Madame Montagné – Mais on les laisse faire, que voulez-vous !

Monsieur Dufour, bondissant – Pardon ? Alors moi je vous invite, ne serait-ce qu'une heure, à venir voir le travail qu'accomplissent les assistants d'éducation et vous verrez qu'ils ne laissent rien passer !

Madame Montagné, rire hautain – Non, mais vous pensez bien que j'ai autre chose à faire !

Monsieur Dufour, malgré les tentatives de monsieur Vandeputte d'étouffer la dispute – Eh bien c'est dommage, voyez-vous ! Parce que je crois que la discipline n'est pas que l'affaire de la Vie Scolaire et que la discipline sans le projet supérieur qu'est l'éducation à la citoyenneté n'est qu'une tentative de gérer les problèmes par la force sans avoir à se remettre en question !

Monsieur Manin – Ecoute, Christian ! Ton couplet, on le connaît ! Arrête d'essayer de noyer le poisson systématiquement ! L'institution scolaire va mal, tu le sais très bien ! Alors pourquoi essaies-tu de nier le problème avec tes salamalecs ?...

Monsieur Dufour, interrompant le prof – L'institution ! Tu le dis toi-même ! Mais en ce qui concerne ce collège, je ne vois pas ce qui va mal, d'autant qu'on n'en est qu'à la rentrée, je te rappelle !...

Monsieur Manin, vexé – Je sais très bien que c'est la rentrée ! Je ne suis pas sénile encore, tu sais !

Monsieur Vandeputte, parlant plus fort que de raison dans son micro défectueux – Bon, on va arrêter là, je pense !

Madame Montagné, à propos de monsieur Dufour – Nous sommes en plein rêve, ma parole !

Ed – Quelle pute !

Tony – Chut, mais chut ! Elle va finir par entendre !

Ed – Tu t'inquiètes pour rien ! Vu son langage châtié, elle ignore ce que veulent dire les mots pute, cul, bite et couilles !

Madame Montagné, se retournant l'air dégouté – Pardon ?

Madame Hachiche, se saisissant du micro de son adjoint – Bon, eh bien l'heure tourne : je vous propose de nous retrouver devant le verre de l'amitié !

 



 



07/01/2011
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