SEVICE PUBLIC

11. LE COLLIER DE PERLES.





Tony devait surveiller la cour de récréation pendant la pause méridienne. Quelle horreur ! Deux heures à s’ennuyer ! Et puis il y avait Vincent Lanusse qui  ne  le décollait pas…  Malgré l’habitude, Tony n’arrivait pas comprendre pourquoi le père de Vincent, prothésiste dentaire, n’avait jamais rien fait pour arranger la mâchoire supérieure de son fils qui se voyait ornée de trois énormes incisives rondes !

Vincent - …non mais je te jure, elle est gavée belle avec ses cheveux blonds ! Et en plus elle a les yeux trop bleus ! Tu vois, bleu hyper clair, qu’on voit loin !

Tony, distrait – Mouais…

Vincent, euphorique – Et comment on dit quand quelqu’un il a les yeux bleus ?

Tony, l’air sceptique - …

Vincent, insistant – On dit comment quand il a les yeux bleus ?

Tony, un peu las – Chais pas…On dit qu’il a les yeux bleus…que veux-tu qu’on dise d’autre ?

Vincent, rêveur – Ouais…sûrement !

Lola, une élève de troisième, interrompant la conversation - Tony, elle est là l’infirmière ?

Vincent, avec ses grands airs – Euh…tu nous interromps, là !

Lola – Ouais…j’ai plutôt l’impression que tu le fais chier avec tes histoires !

Tony, ne sachant trop que dire – Lola, évite ce genre de mots…

Lola – Je m’excuse…mais bon, il est con ! Sinon, elle est là l’infirmière ?

Tony, interrompant la riposte de Vincent – Chut Vincent! – A Lola - Oui, l’infirmière est ici et j’aimerais que tu parles autrement à tes camarades !

Lola, indifférente – Je peux y aller ?

Tony – Oui !

Vincent, regardant sa contemptrice partir – Mouais, elle fait sa maligne mais elle a pas les yeux bleus, elle !

Tony, songeur – Eh oui !

Vincent – Ma sœur elle a les yeux verts avec un peu de marron en dedans ! Par contre elle est infecte ! T’imagines si c’est grave !

Tony – Comment ça elle est infecte ?

Vincent – Ben tu sais elle est amputée de la jambe et sur la tranche ou c’est coupé, eh ben y’a du pus !

Tony, une légère grimace d’écoeurement – Elle est infectée ! Pas infecte !

Vincent – C’est pareil ! Et alors quand ma mère a enlevé la bande, ça sentait gavé mauvais…

Lola – Tony, y’a personne !

Tony – Où ?

Lola – A l’infirmerie, tiens !

Tony – Ah mais non… J’avais oublié : elle ne sera pas là avant une heure !

Lola – Merde !

Tony – Pourquoi, qu’est-ce qui t’arrive ?

Vincent, vengeur – Elle veut maigrir, je crois !

Lola – Putain, mais ta gueule connard !

Tony, haussant le ton – Bon, ça va maintenant ! Je ne veux plus entendre ce vocabulaire !

Lola, le regard bas – Excuse…

Tony – Que t’arrive-t-il ?

Lola – Mais j’ai perdu encore un ongle d’orteil ! Et comme ça saigne, j’aurais voulu un pansement !

Tony, étonné – Un ongle ? Et comment tu as fais…

Lola, naturelle – C’est une copine qui m’a marché sur le pied !

Tony, effaré – Je veux bien mais quand même ! Quand on me marche sur les pieds je ne perd pas un ongle comme ça !

Lola, toujours insouciante – Oh mais c’est mon quatrième !

Tony – Quoi ?

Vincent, sérieux et croyant savoir de quoi elle souffre – Ah ! Mais j’ai vu ça en histoire ! Tu dois avoir la lèpre…

Lola – Putain, mais ta gueule !

Tony – Bon, Vincent: va voir ailleurs si j’y suis !

Lola, regardant Vincent partir – Avec ses trois dents, il peut parler !

Tony – Bref ! Attends un peu, l’infirmière va arriver... C’est bizarre ! Tu perds tes ongles aux doigts aussi ?

Lola, hilare – Non mais tu me prends pour une musulking ?

Tony, à l’ouest – Musulking?

Lola – Ouais, les musulkings! Tu sais ceux qui ont six doigts !

Tony, l’air sévère – J’imagine que tu parles des musulmans !

Lola – Ouais, c’est pareil…

Tony – Non ! Ce n’est pas pareil ! Evite d’employer ce genre de mots !

Lola, ingénue – Mais c’est mon père qui le dit…

Tony, vaincu à l’usure – D’accord, je vois ! Bon, va à la vie scolaire et assied-toi jusqu’à la demi ! L’infirmière sera là !

Lola – Ok, merci Tony !

D’un coup, Tony prit un ballon entre les deux oreilles : c’était Alexandre, la tête de nœud.

Tony, victime de son premier raptus – Mais qu’ils sont cons nom de dieu !

Alexandre – T’as pas le droit de nous parler comme ça !

Tony – Ah ouais ? Eh bien je le confisque le ballon !

Alexandre – Mais vas-y, rends-le ce ballon, putain !

Tony – Pardon ?

Alexandre, s’avançant vers Tony, gonflant son petit torse décharné – Et tu vas faire quoi, là ?

Tony – Tu commences à me gonfler sévère ! C’est pas parce que tu te sens protégé qu’il ne va pas te tomber une tuile sur le pif ! Tu vois ce que je veux dire ?

Alexandre – Je vais le dire à mon frère et il va te chopper à la sortie !

Tony – Tu me sors par les yeux ! Tu viens avec moi chez les CPE !

Alexandre – Mon frère il va régler ça un de ces quatre !

Tony – Tu peux pas te démerder tout seul quand tu te comportes comme un petit con ?

Madame Sauzéon, les voyant entrer tous les deux dans la vie scolaire – Qu’est-ce qui se passe Tony ?

Tony – Il se passe qu’il m’a tiré le ballon dans la tête et qu’il me fait des menaces !

Alexandre – Il nous a traité de « cons » madame !

Madame Sauzéon – Non mais qu’est-ce qu’il vous prend Tony ?

Tony – Il me prend que j’en ai marre qu’il se croit au dessus de tout !

Madame Sauzéon – Vas dans mon bureau Alexandre ! – Puis, à Tony – Ca me pose problème que vous parliez sur ce ton à des enfants…

Tony, acerbe – Si vous le couvriez moins, ça n’arriverait pas !

Madame Sauzéon – Ne le prenez pas mal Tony, mais vous ne savez pas gérer les situations conflictuelles !

Tony – Je crois que je ne comprends pas très bien !

Madame Sauzéon – Tony…je sais que c’est parfois difficile de se contrôler quand on a affaire à des adolescents comme Alexandre…mais vous devez vous sortir de la tête qu’il vous vise particulièrement !

Tony – Vous plaisantez ? Il me parle comme une merde systématiquement…

Madame Sauzéon – Je sais ! Mais vous ou un autre, c’est pareil ! Alexandre est dans la confrontation par principe ! Chaque fois que vous réagissez violement à ses provocations, vous vous faites le miroir de sa propre violence et vous légitimez par là son agressivité ! Essayez de désarmer ce genre de situation !... Et si vous avez du mal à le faire, n’hésitez pas à rompre l’affrontement et à nous en laisser la charge !

Tony, reprenant ses esprits – Bon…je vais essayer de faire comme ça…

Madame Sauzéon – Vous savez… je crois que l’école est là pour les aider à grandir et plutôt que de les punir à la moindre faute, je crois qu’il faut plutôt les valoriser et les rendre responsables !

Tony – Mouais…encore faut il qu’il en soit capable!

Madame Sauzéon – …si nous, nous ne pensons pas que le sujet peut changer qui le croira ?

Tony – N’empêche qu’il m’a manqué de respect !

Madame Sauzéon – Alors Alexandre va être sanctionné mais il faudra lui laisser une chance quand il aura payé sa dette !

Tony, acerbe – Sa dette ? Et je peux compter sur des intérêts ?

 

 

 



20/08/2009
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