14. NOUVELLES RECRUES.
Anna, furieuse – Non mais ça va faire plus d’un mois qu’on travaille en sous-effectif ! Ils vont venir quand les nouveaux ? Je me suis tapé deux heures de permanence et je dois encore en faire une ?
Monsieur Dufour – Ecoutez, les nouveaux viennent ce matin ! Un peu de patience !
Anna – J’en ai marre d’aligner les heures d’études ! Les élèves sont insupportables !
Monsieur Dufour – Johanna et Cédric sont malades ! Quant à Mario et Tony, j’ai encore besoin d’eux !
Anna – Mais ils n’ont rien fait de la matinée, ils attendent que vous leur disiez ce que vous attendez d’eux…
Monsieur Dufour, furax – Je suis CPE ! Je n’ai pas à me justifier…
Anna – C’est facile, ce genre d’argument…
Monsieur Dufour – Il se trouve que j’ai passé un concours de catégorie A pour ne pas à avoir à me justifier auprès de quelqu’un comme vous ! J’en ai plus que marre que l’on dise que je ne fous rien ! J’ai travaillé toute la matinée et je crois qu’à ma place vous ne seriez pas à votre aise ! Alors faites ce que vous avez à faire ! Vous apprendrez que les choses ne vous tombent pas dans l’assiette toutes cuites…
Anna, outrée mais encore véhémente – J’y crois pas ! M’entendre faire la leçon de morale par quelqu’un qui vit dans un appartement de fonction et qui ne paie pas de loyer alors qu’il gagne au moins deux fois le SMIC ! Moi je suis indépendante depuis que j’ai l’âge de dix huit ans et je m’assume seule ! Je ne vous permets pas de me parler comme si j’étais une gamine de quinze ans !
Monsieur Dufour, pressé d’aller vers la vie scolaire – Peut être, mais c’est vous qui allez la faire cette heure de permanence, pas moi ! Et vous savez pourquoi ? Parce que moi je l’ai, mon concours de catégorie A !
Mario, alpaguant monsieur Dufour au vol – Les deux nouveaux assistants d’éducation sont au secrétariat ! Ils vous attendent !
Monsieur Dufour, attrapant un rouleau de papier hygiénique dans son tiroir – Ecoutez, j’ai attrapé une saloperie… J’en ai pour un petit moment...
Mario, comme si de rien n’était – Bien ! On leur fait la visite et tout le reste !
Monsieur Dufour, sous les yeux ébahis de Tony – Ok, ça marche ! A tout à l’heure !
Tony, une fois le CPE parti – Mais qu’est ce qu’il fait avec…
Mario, blasé - …avec son PQ ? Il a du chopper la gastro !
Tony, au moment même où madame Sauzéon entre dans la vie scolaire – Non !
Mario, cynique - Heureusement qu’il habite juste derrière le collège, sinon on pourrait se demander comment il ferait !
Madame Sauzéon, faisant la bise du bonjour à Mario – De quoi parlez vous ?
Mario – Votre collègue est parti chez lui faire caca !
Madame Sauzéon– Encore ? Mais… je crois qu’il a des problèmes intestinaux !
Mario – Ah !... On doit aller chercher les nouveaux assistants d’éducation qui attendent au secrétariat !
Anna, sortie de sa permanence – Ouais…ça fait une demi heure que vous auriez du aller les chercher ! Au lieu de ça, vous vous roulez les pouces pendant que moi je me tape des permes à la suite !
Tony – Tu veux que je prenne celle-ci ?...
Anna, acerbe – C’est bon ! Je peux me débrouiller toute seule !
Tony, penaud – Bon…OK.
Anna – N’insiste pas trop surtout !
Tony – Ecoute…c’est pas facile de te suivre !
Anna – Tu vas voir que ça va être de ma faute ! Ca fait au moins une demi-heure que Dana vous a appelé pour vous dire que les nouveaux attendaient !
Madame Sauzéon – Comment ça depuis une demi-heure ?
Anna, vengeresse – Mais oui ! Dufour n’a pas voulu qu’on y aille parce qu’il voulait faire son beau auprès des nouveaux ; sauf qu’après être allé chercher son journal et son pain, il est allé boire le café avec la conseillère d’orientation et a fini son périple en faisant un crochet à l’intendance pour voir son pote ! En fin de compte, il va faire caca et demande aux garçons qui n’ont rien fait de la matinée de recevoir les nouveaux pions !
Madame Sauzéon, conciliante – Ecoutez Anna, je veux bien comprendre qu’il est pénible de faire trois études à la suite, mais les garçons n’y sont pour rien et monsieur Dufour a réellement des problèmes gastriques…
Anna, décidée à foutre le camp, furieuse – Ouais, c’est ça ! Quand c’est moi, personne n’en a rien à foutre !
Madame Sauzéon, vindicative – Quelle sale bête ! – Puis, aux garçons - Je viens avec vous ! Ca me suffit de la dernière fois où on a embauché une surveillante sans me consulter ! – En faisant un hochement de tête dans la direction d’Anna qui s’en retournait en perme - Vous voyez ce que ça a donné ?!
Tony, surmontant sa gêne – Euh…je voulais vous dire…Il y a mon cousin…
Madame Sauzéon, avec un clin d’œil à Mario, amusée – Avec tout ce piston, on se demande pourquoi c’est si difficile de trouver du travail quand on n’a pas le bras long !
Tony, au pied de la lettre – Euh…
Madame Sauzéon, entrant dans le secrétariat – Bon, alors c’est vous les nouveaux assistants d’éducation ?
Le garçon, tendant une poignée de main franche – Edouard S. !
La fille, faisant de même – Olga !
Edouard, d’un air complice – Oui, on est cousin…
Madame Sauzéon, toujours amusée de la tête de Tony – Je sais ! Vous avez vu monsieur Lagardère, le principal ?
Edouard et Olga, en chœur – Oui…
Madame Sauzéon – Bon, alors allons à la vie scolaire…Mario, vous ferez visiter l’établissement aux nouveaux…
Edouard – L’autre CPE l’a déjà fait…
Madame Sauzéon– Ah ? Bon…briefez-les alors sur les tâches qu’ils auront à accomplir…
Monsieur Vandeputte, sortant de son bureau avec madame Bretelle, tous deux l’air « aimable » – Qui c’est qui a des tâches à accomplir ?
Tony, prenant Edouard par le bras – Viens… Pas la peine de traîner ici !
Edouard – C’est qui ces deux cons ?
Tony – Tu vas vite apprendre à les connaître !
Edouard – Et ils sont comment les gosses ici ?
Tony – Tu vas vite voir…
Edouard – Ben dis donc, ça n’a pas l’air drôle, ici !
Anna, les croisant au moment où tout ce petit monde arrivait à la vie scolaire – Tiens ! Bonjour, moi c’est Anna… Tony, tu fais la permanence ? Je te l’ai faite rentrer !
Tony, pris au dépourvu – Euh…Ben tu n’as qu’à venir avec moi Ed ! Je vais te montrer comment on fait…
Ed – OK !
Anna, à la nouvelle assistante – Et toi, c’est ?
Olga, l’air vaguement hostile – Quoi ?
Anna, exagérément mielleuse – Ton nom ?
Olga – Si c’est mon prénom que tu veux savoir, c’est Olga ! Pourquoi ?
Anna – C’est joli…
Olga, dans un souci de précision – Olga Bey…
Anna – Bey? Tu n’as pas un frère qui travaille au Lycée Miller ?
Olga – Si ! Siegfried ! Tu le connais ?
Anna – Oui, j’ai travaillé avec lui il y a deux ans ! Il y est toujours ?
Olga – Non, il travaille au collège François Mitterrand, avec ma sœur Pacontas !
Anna – Tu as une sœur aussi ?
Olga – Quatre sœurs et six frères !
Anna, étonnée – Vous êtes nombreux, dis donc…
Olga, visiblement piquée – Ouais…mais je ne vois pas ce que ça peut faire qu’on soit nombreux ! C’est ma famille, point à la ligne !
Anna, très gênée – Ne le prend pas mal, je suis juste un petit peu étonnée…
Olga, vindicative – Je sais ! Les gens de mon pays font beaucoup de gosses !
Anna, pétrifiée par le froid involontairement jeté – Bon, je vais voir si Tony a besoin d’aide parce qu’il a repris ma permanence et les enfants sont insupportables…
Tony – Tiens Anna, tu as besoin de quelque chose ?
Anna, étonnée du silence imposé à l’assemblée – Non…je venais juste voir si vous en sortiez…
Ed – Ma foi…Tony me montre les ficelles…Je crois que ça va le faire !
Anna, toujours amère – Dis Tony, j’ai discuté un peu avec la nouvelle et franchement, elle n’a pas l’air marrante…
Ed, le cœur léger – Ah ! Non mais ne t’inquiètes pas, c’est une connasse !
Anna et Tony – Quoi ?
Ed, catégorique – J’ai passé une demi-heure avec elle dans le secrétariat et je peux vous dire une chose : ce n’est pas qu’elle n’est pas marrante, c’est une connasse !