16. SOUTIEN MATHEMATIQUE.
Après l’appel de la permanence, Tony se mit
à lire « Théorie des systèmes dynamiques non linéaires », un ouvrage
à la lecture ardue. Il butait sur l’équation de Clausius relative à la
croissance de l’entropie : dS≥0. Sachant que dans un système ouvert la
variation totale d’entropie s’écrit : dS=deS+diS…la merde, quoi ! Vincent
Lanusse interpella Tony :
-Tony, tu peux m’aider pour mes maths ?
Tony, embarrassé – Mouais…
Vincent – Merci c’est super sympa de ta part !
Tony, éteint – Je fais mon travail, rien de plus !
Vincent – Ouais mais c’est quand même super sympa !
Tony, sans grande conviction – Merci…
Vincent – C’est pour les nombres fractionnels…
Tony – Fractionnaires !
Vincent – Ouais, c’est ça, fractionnés !
Tony, ne prêtant même plus cas – Bon, c’est quoi le problème ?
Vincent – On me demande quelle est la fraction qui traduit le rapport entre une heure et une journée…
Tony, griffonnant sur une feuille de brouillon – Mouais…bon, tu sais qu’une fraction est composée d’un numérateur et d’un dénominateur ?
Vincent – Ouais…
Tony – Bien. Regarde sur la feuille : si tu prends un gâteau, que tu le coupes en deux et que ton chien en mange une moitié, quelle part reste-t-il ?
Vincent, interloqué – Mais c’est pas qu’est ce qu’on me demande…
Tony, articulant peu – Ah ! Excuse moi…on va raisonner sur un cas plus simple pour voir si tu as bien compris le principe des fractions.
Vincent, droit dans les yeux, à la fois sincère et impressionné – C’est pas con ça !
Tony – Ouais, on dirait pas quand on me voit… Donc : si tu prends un gâteau, que tu le coupes en deux et que ton chat en mange une moitié, quelle part reste-t-il ?
Vincent, persuadé de faire preuve de sagacité – Tout à l’heure tu as dit « ton chien » ! En plus les chats, je te ferais remarquer, ils mangent pas de gâteau !
Tony, vaguement réanimé par l’agacement – Non, mais on s’en tape…bon : si ton chien ou le mien en mange la moitié, quelle part reste-t-il ?
Vincent – L’autre !
Tony, les yeux aux cieux – Non ! J’ai mal posé ma question…quelle est la fraction qui traduit la part restante de gâteau ?
Vincent – La moitié ?
Tony – Mouais…
Vincent, soudain illuminé – Un demi ?
Tony, surpris – Bien ! Pourquoi un demi ? Au dénominateur tu places le nombre total de parts et au numérateur tu places le nombre de parts que concerne ton énoncé ! Là, par exemple, il y a deux parts de gâteau ? Donc tu places deux au dénominateur, c'est-à-dire le nombre total de parts, puis un au numérateur, soit le nombre de parts concerné par ton énoncé…
Vincent – Ok, j’ai compris !
Tony – Bien : alors ce rapport entre une heure et une journée, ça donne quoi ?
Vincent, visiblement largué – Euh…
Tony – Tu mets quoi au dénominateur ?
Vincent, victorieux – Ah oui ! On met un au dénominateur pour une journée et un au numérateur pour l’heure !!
Tony, de sa voix monocorde – Et un sur un ça fait un !
Vincent, fier comme Artaban – Donc c’est un !
Tony, dans sa barbe – Oh putain, c’est pas vrai…
Vincent – Hein ?
Tony – Non, rien. Alors, combien d’heures dans une journée ?
Vincent – Six !
Tony – Quoi ?
Vincent – Non, douze !
Tony – Ne dis pas n’importe quoi comme ça !
Vincent – Onze !
Tony – Non…A quelle heure commence une journée ?
Vincent – A une heure.
Tony- Ok et à quelle heure finit elle ?
Vincent – A douze heures…
Tony, effaré – Oui…mais combien de tours de cadran l’aiguille fait-elle au cours d’une journée ?
Vincent – Quel cadran ?
Tony, vaincu – Ok, il y a vingt quatre heures dans une journée ! Alors, où vas-tu mettre le 24 sachant que dans une fraction tu dois placer la quantité totale au dénominateur ?
Vincent – En haut ?
Tony – Et comment on appelle ce que l’on met en haut ?
Vincent, le sourire enchanté – Le numérateur !
Tony, au bord de la dépression – Alors pourquoi tu me dis que tu mets 24 au numérateur quand je te dis que tu dois le mettre au dénominateur ?
Vincent – J’avais pas compris…
Tony, peinant à articuler – On reprend : si tu mets 24 en bas, en haut tu mets combien ?
Vincent – Un ?
Tony, hébété – Un ?
Vincent, illuminé par l’évidence – Ben oui, car y’a qu’une heure !
Tony, presque enchanté – Oui ! C’est ça ! Alors voyons la suite : quelle fraction représente le rapport de six heures et d’une journée ?
Vincent, rapide comme la lumière – 1/24 ?
Tony, peinant à ne pas hausser le ton – Non ! On a six heures et le dénominateur n’a pas changé !
Vincent – Ah oui, qu’est ce que je suis con ! Ca fait 24/6 !
Tony, la tête dans ses mains – Je t’en prie Vincent, fait un effort ou on ne va pas s’en sortir !
Vincent, à la hâte – 6/24 !!
Tony, ne cherchant même plus à savoir si la réponse relevait de la chance ou de la réflexion – Oui ! Maintenant il faut la simplifier…
Vincent – Ouais, je sais, j’ai vu ça en classe !
Tony, dans sa barbe – Encore heureux…
Vincent – Hein ?
Tony – Non, rien…6/24, ça donne quoi quand tu simplifies ?
Vincent – 1/24 !
Tony – ¼ !
Vincent – Pourquoi ?
Tony, regardant sa montre – Va à ta place, essaie de trouver pourquoi et reviens me voir quand tu as la réponse…ou si tu ne l’as pas.
Vincent – Ouais, ça marche.
Tony, encore dans sa barbe – Bon, je vais peut être pouvoir m’y remettre… « La variation totale d’entropie s’écrit : dS= deS+diS… » Putain, j’y pige rien ! Je suppose que dans ce cas dS-deS=diS…non, ça ne veut rien dire…
Vincent – Tony, j’ai trouvé !
Tony, plus tellement dans sa barbe – Con de merde ! Il ne va pas me lâcher !
Vincent – Hein ?
Tony – Je…j’aimerais bien m’en sortir…
Vincent – De quoi tu parles ?
Tony, se ravisant – Non, rien ! Alors ?
Vincent – 1/24, ça donne ¼ !