20. LES CAPESIENS.
Anna partait pour la permanence, un livre à la main – A tout à l’heure Tony !
Tony, mettant les bulletins de notes du second trimestre sous pli – Tu veux que je vienne t’aider faire la permanence ?
Anna, agréablement surprise – Non, c’est gentil ! Tu viens de t’en taper deux d’affilée ! Reste tranquille !
Tony – J’ai juste à mettre des bulletins dans des enveloppes, toi tu bosses ton CAPES ! Je peux t’aider, si tu veux !
Anna – Non merci ! Ca va aller !
Ed, spirituel – Quand tu auras ton CAPES, tu feras partie d’une grande dynastie !
Anna – Tu ne vas pas t’y mettre toi aussi ! Les profs ne sont pas des nantis, faut arrêter !
Ed – La dynastie capésienne…
Anna, un peu blasée – Morte de rire !
Ed – Hihihi, trop fort ! T’as besoin d’aide Tony ?
Tony – Pourquoi pas ?
Une dame – Bonjour ! Pourrais-je parler au CPE s’il-vous-plait ?
Tony - Lequel ?
La dame – Celui qui s’occupe des quatrièmes !
Tony – Madame Sauzéon? Il y a une dame pour vous…
Madame Sauzéon – Faites là entrer Tony… Bonjour madame ! Tenez, fermez la porte, je vous prie…
Ed – Je ne comprends pas pourquoi les CPE ont cette manie de fermer leur porte quand quelqu’un vient leur parler de leur moutard !
Tony – Peut être parce que ça ne nous regarde pas !
Ed – Arrête ! On est une équipe ! On est censé savoir les mêmes choses que les CPE ! Je te rappelle que nous sommes au contact des gamins à longueur de journée, alors s’il y en a qui doivent être informés, c’est bien nous !!
Tony – Bof… Regarde le bulletin d’Alexandre ! Trois de moyenne générale !
Ed – Il a été fini à la pisse, ce crevard !
Tony, faussement offusqué que son cousin ait le courage de dire fort ce que lui pensait – Chut !
Ed, amusé – Oh, ça va ! Tu préfèrerais que je dise qu’il a été commencé dans la merde ?
Anna, entrant dans le bureau – Vous savez où est Vincent ?
Ed – Quel Vincent ?
Anna – Vincent Lanusse !
Tony – Non, je ne sais pas… Attend qu’arrive Olga, elle relève les absents aujourd’hui !
Olga, à Anna – Je suis allée faire pipi !
Ed, à Olga – Tu sais où est Lanusse ?
Olga, offusquée – Quoi ? Non mais tu te calmes !
Tony, à son cousin, en aparté – Ed ! Tu dailles ! Elle va refaire sa crise !
Anna – Olga, c’est de Vincent Lanusse qu’il s’agit !
Olga, visiblement soulagée – Il est malade depuis hier !
Anna – Ok, je retourne en permanence !
Olga, à Ed – Et toi, tu arrêtes avec tes blagues débiles !
Ed – Moi je ne les trouve pas si débiles que ça !
Olga – Va t’faire voir !
Madame Sauzéon, criant pour se faire entendre – Ed ! Vous pouvez venir dans mon bureau ?
Ed – Oui ?
Madame Sauzéon – Ed ! Voici madame Niquet ! Elle est venue parce que vous avez puni sa fille hier…
Ed – Eva ? Oui, en effet ! Hier, au réfectoire, Eva a jeté des spaghettis à la carbonnara contre la baie vitrée avant de cracher sur un petit sixième !
Madame Sauzéon, outrée – Ah bravo ! Je suis désolée madame mais là je ne vois pas pourquoi j’annulerais l’avertissement que lui a mis le surveillant !
Madame Niquet – Si ma fille a réagi comme ça c’est il y a une raison !
Ed – Je suis désolé, elle a craché sur un petit sixième, minuscule, incapable de se défendre !
Madame Niquet, péremptoire – Moi je vous dis qu’il a du l’agresser !
Madame Sauzéon – Tony, regardez où se trouve le petit Perrier de 6E et amenez-le moi s’il-vous-plaît ! Passez aussi chercher Eva en permanence ! Merci.
Madame Niquet, regardant en coin Ed, revenu avec les deux élèves – Moi je peux vous dire, madame Sauzéon, qu’à la place de ma fille je ne me serais pas laissée punir par un pion !
Ed, laconique – Oh mais je ne lui ai pas laissé le choix !
Madame Niquet, provocatrice – Amusez-vous ne serait-ce qu’une fois de la toucher et c’est à son père que vous aurez à faire !
Ed, décidé à en découdre – Sans blague ?
Madame Sauzéon, voulant désamorcer le conflit – Merci Tony, faite les entrer ! Thomas, Ed a puni Eva parce qu’elle t’avait craché dessus…
Thomas – Oui !
Madame Niquet, menaçante – Et pourquoi elle t’a craché dessus ? Tu lui as fait quoi ?
Madame Sauzéon – Calmez vous madame Niquet ou je vous demande de sortir !
Thomas, placide – Elle m’a craché dessus parce que je lui ai dis : « ta mère à quatre pattes, je l’encule ! »
Madame Sauzéon, avalant sa salive de traviole – Quoi ?
Madame Niquet, à deux doigts de cogner le nain – Quoi ?
Ed, estomaqué qu’une telle horreur sorte de la bouche d’un petit comme ça – Hein ?
Madame Sauzéon, reprenant ses esprits – Parle mieux ou je t’en colle une !
Ed, à Eva – Pourquoi tu ne m’as rien dit ?
Madame Niquet – Je le savais ! Si tu ne l’avais pas injuriée, elle n’aurait pas été obligée de se défendre !
Thomas, toujours placide – Je l’ai injuriée parce que juste avant elle m’a mis un coup de pied dans les couilles !
Madame Sauzéon, reperdant ses esprits – Non mais tu te crois où Thomas !
Madame Niquet – Mais tu lui as fait quoi pour qu’elle en vienne à te taper dans le kiki ?
Thomas, loin de se démonter – Elle ne faisait que me dire de me mettre une bouteille de Perrier dans le cul et comme je m’appelle Perrier Thomas et que j’estime qu’elle n’a pas à manquer de respect à mon nom de famille, je lui ai dit d’aller se faire niquer !
Madame Sauzéon et madame Niquet, en chœur – Quoi ?
Thomas, zen – Ben ouais, ça va avec son nom !
Ed, décidé de clore le chapitre – Eva, pourquoi tu lui dis de se mettre une bouteille dans le fondement ?
Eva – Quand on était au primaire, il me disait toujours de lui sucer la queue !
Madame Niquet, éprise de justice – Ah ! C’est vrai ! Je peux témoigner ! Une fois il a même insulté mon mari de « manche à couilles » !
Madame Sauzéon, exaspérée de la tournure de la discussion – Je vous en prie madame Niquet, surveillez votre langage !
Ed, se focalisant plutôt sur la situation – Tu étais en quelle classe, Thomas, à l’époque ?
Thomas, imperturbable – En CP !
Ed – Eva, ça remonte loin tout ça ! Pourquoi ça refait surface ?
Madame Sauzéon – Le surveillant a raison, je suis désolée !
Madame Niquet – Non mais vous vous rendez compte de ce qu’il a osé dire à ma fille ?
Madame Sauzéon, dépitée – Mais enfin, ça fait cinq ans maintenant !
Madame Niquet, indignée – Mais il n’a même pas été puni par l’instituteur à l’époque ! Vous trouvez ça normal ?
Madame Sauzéon – Non ! Ce n’est pas normal ! Mais il n’est pas normal non plus que votre fille veuille régler cette histoire cinq ans après !
Thomas, innocent – En plus je lui ai pas redit de me sucer depuis!