SEVICE PUBLIC

28. ET AU MILIEU COULE UNE PISSOTIERE.





Vincent Lanusse entra en permanence chercher Tony :

Vincent – Tony, y’a une élève en train de gerber aux waters !

Tony, irrité d’être interrompu dans sa lecture – Et qu’est ce que tu veux que ça me fasse ?! Va à la vie scolaire !

Vincent – Mais j’en viens !

Tony – Quoi ?

Vincent – C’est Maria qui m’a dit de venir ici !

Tony, à voix plus haute qu’il ne l’aurait souhaité – Non mais c’est pas vrai ! Je ne dois pas bouger de perme, je me coltine quatre vingt gamins et je dois m’occuper d’un pignouf qui dégueule dans les chiottes !

Vincent – Ouais mais c’est Maria qui m’a dit…

Tony – Il faudrait qu’elle se calme un peu, la Maria ! Elle n’ est pas CPE que je sache !

Johanna, déboulant en étude, visiblement impatiente – Bon, qu’est-ce que tu fais ? Tu viens ou quoi ?

Tony, à la fois exaspéré et irrité – Je ne dois pas quitter la permanence, y’a vraiment personne qui peut y aller à ma place ?

Johanna – Non ! Ed a pris la seconde permanence mais je ne sais pas dans quelle classe il a mis les élèves !

Tony – Mais… et les autres ?

Johanna – Ah non ! Moi je ne peux pas ! Ca me donne envie de vomir ! Je suis désolée mais je fais ce que je peux, d’accord ?

Tony, étonné du ton que prend Johanna – Quoi ?

Johanna – Après… y’a personne, moi je peux pas inventer des gens qui ne sont pas là ! Mario et Cédric ne bossent pas aujourd’hui !

Tony – Et Maria ? Et Olga ? Et Anna ?

Johanna, énervée par l’attitude de Tony – Anna est au secrétariat ! Quant à Maria et Olga, figure-toi qu’elles sont comme moi ! – Devant l’hésitation de Tony - Non mais c’est bon ! Si tu ne veux pas y aller, je vais me débrouiller !

Tony – C’est bon ! J’y vais !

Johanna – Ah non, mais moi je ne veux pas te forcer !...

Tony – J’y vais ! Tu peux garder ma permanence, le temps que je m’occupe de notre malade ?

Johanna – Attend ! Moi j’ai une perme après ! J’ai pas envie de me taper la tienne en plus !

Tony – C’est bon ! Je me débrouille !...

Emilie, voyant arriver Tony – C’est pas beau à voir, je te préviens !

Tony, bougon – Pourquoi t’es là, toi ?

Emilie – Je suis déléguée de classe… c’est le prof qui m’a dit de le descendre à la vie scolaire… mais on est plutôt allé aux toilettes !

Tony – Bonne idée ! Et c’est qui, au fait ?

Emilie – Anthony…

Tony – Anthony?

Emilie, sur le ton de l’évidence – Ben… Anthony Malfait!

Tony – Désolé, mais je ne peux pas deviner! Il gerbe encore ?

Emilie – Je crois qu’il est bourré !

Tony – OK, je vois ! – Entrant plus avant dans les toilettes – Anthony ? C’est Tony ! Ouvre la porte s’il-te-plaît !

Anthony, dans un immonde râle de vomi – Non ! Laisse-moi mourir !

Tony, plus agacé qu’inquiet – C’est bon ! Tu ne vas pas mourir ! Allez, ouvre-moi !

Anthony, s’exécutant – Ahhh… j’arrête pas de gerber !

Tony, pris de nausées – Ouais, je vois !

Anthony – J’en peux plus… beurk !

Tony – Pfft ! Relève-toi ! Tu es couché dans l’eau !

Anthony, en pleurs – Je veux mourir !

Tony, accroupi – Mais qu’est ce qui t’arrives, bon sang de bon soir !

Anthony, à ras le museau de Tony – J’ai bu une bouteille de Malibu avant de venir au collège !

Tony, se détournant du crétin malheureux  – Oh là, oui, tu sens l’alcool !

Anthony – Ah oui ? Pourtant j’ai gerbé…

Tony, une main devant le nez – Oui ! Non mais ça aussi ! Mais pourquoi tu as fais ça ? T’es pas marteau, non ?

Anthony – Je me suis fais casser par ma copine !

Tony – Comment ça « casser » ?

Anthony, repartant de plus belle en larmes – Mais à ton avis ! On n’est plus ensemble !

Tony – Ah ! Tu veux dire qu’elle a cassé !

Anthony, dans un mélange capricieux de cris et de larmes – Mais oui !

Tony – C’est bon, j’essaie de comprendre moi !

Anthony – Je veux mourir !

Tony – Euh… Ca faisait longtemps vous deux ?

Anthony, frôlant l’hystérie – Onze jours !

Tony – Quoi ? Non mais on ne suicide pas pour une histoire de onze jours ! Faut se calmer un peu !

Anthony, se roulant par terre – Mais tu comprends rien ! Nous les jeunes on souffre gavé quand des trucs comme ça, ils arrivent !

Tony – Allez, lève-toi… Mais… Oh non, c’était pas de l’eau… Lève-toi Anthony ! Tu te roules dans la pisse !

Anthony – Et alors ? J’ai envie de mourir !

Tony, l’attrapant sèchement par les épaules – Mais lève-toi putain, ça pue la tioure !

Anthony, chouinant – Mais laisse moi mourir !...

Tony – Allez, viens avec moi à la vie scolaire !

Anthony – Soutiens-moi ou je vais me casser la gueule…

Tony – Ok, c’est bon ! Appuie-toi sur moi ! – Sentant quelque chose de crémeux sur ses doigts – Quoi ?... Mais tu t’es gerbé dessus ! Oh putain !

Anthony, se remettant à pleurer – Mais c’est bon… j’ai pas fais exprès…

Emilie, dégoutée par le spectacle – Quelle horreur !

Tony – C’est bon les commentaires ! Tu peux m’aider ?

Emilie – Ben… je suis propre là ! J’ai pas envie d’avoir du vomi sur moi !

Tony – Merci beaucoup !

Emilie – De rien…

Tony – Tu peux m’ouvrir la porte de la vie scolaire, au moins ?

Emilie – Ouais…ça, je peux !

Tony – Merci !

Maria – Oh non ! Pourquoi tu l’amènes ici ! Tu vois pas qu’on petit-déjeune !

Madame Sauzéon – Qu’est-ce qui se passe ?

Tony – Il a pris une murge et il a gerbé partout !

Maria, en colère – C’est bon ! Passe nous les détails !

Madame Sauzéon, appelant son collègue – Christian ! Tu viens deux minutes ?

Monsieur Dufour – Qu’est ce qui lui arrive ?

Tony – Il a pris une caisse et il est malade !

Madame Sauzéon – Qu’est ce qu’on fait ? Si on le dit à Lagardère, il va se faire virer !

Monsieur Dufour – Ouais… même s’il a eu un comportement de crétin, il ne mérite pas de se faire gicler ! Je vais appeler ses parents et je vais voir avec eux…

Madame Sauzéon – On prévient l’assistante sociale aussi…

Monsieur Dufour – Ouais… Anthony, je crois que je vais demander un suivi médical, avec l’accord de tes parents…

Anthony – Ouais… mais j’ai encore envie de gerber !

Madame Sauzéon – Les filles, il y en a une qui peut l’amener aux toilettes ? Si l’on voit que Tony a laissé les enfants sans surveillance, on va se faire taper sur les doigts !

Johanna – Ah non ! Moi je vais être malade si je le vois vomir !

Maria – Moi je ne suis pas payée pour couvrir les idioties d’un ado !

Olga  – Ah non, moi je ne peux pas ! Déjà que je me sens mal…

Madame Sauzéon, irritée – Bon, alors qu’il y en ait au moins une qui aille surveiller la permanence !

Johanna – Ah non ! Moi j’ai étude juste après ! C’est chacun son tour !

Ed, entrant en catastrophe – Y’a un gosse qui s’est chié dessus dans ma permanence !... Euh… Vous trouvez pas que ça sent la pisse ici ?

 



20/12/2009
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