SEVICE PUBLIC

42. LE JOUR J.




EPREUVE IV : LES ADIEUX.


 

 

Anna et Tony ouvrirent le grand portail. Cette fois, on y était : excepté les rares élèves qui restaient manger, la plupart quittait le collège et le moins que l’on puisse dire, c’est que cette sortie était vécue comme une délivrance par le plus grand nombre. Un groupe de garçons de troisième vint voir Tony :

Stéphane – Bon, Tony ! On vient te dire au revoir !

Tony – Bon ! Passez de bonnes vacances les gars et puis qui sait ? A bientôt, peut être !

Stéphane – Sûrement pas ! On t’aime bien, mais on a autre chose à faire que venir vous voir quand on sera au lycée !... – Hilarité des autres.

Tony, un peu déçu – Je ne pensais pas forcément à ça mais bon !

Stéphane et le reste du groupe – Allez, les pions ! Tchao et bonnes vacances !

Tony et Anna – Tchao !

Tony – Ils sont un peu ingrats quand même !

Anna – C’est normal Tony ! A leur âge, j’étais pareille !

Tony, n’écoutant déjà plus sa collègue, était songeur : aussi bizarre que la chose puisse paraître, il éprouvait un léger pincement au cœur. Plusieurs fois, le matin, il était venu la peur au ventre, prêt à faire demi tour mais mu par la nécessité de passer outre son angoisse… peut être parce qu’il aurait été incapable de justifier sa crainte. Ce job l’avait contraint à arrêter sa thèse et nombreux étaient les gosses qui lui avaient pourri la vie ! Malgré tout, il était mélancolique : il pensait aux gamins. La grande majorité, à la réflexion, valait la peine qu’il se lève le matin… il pensait aussi à ses collègues de boulot… Ed, Anna, Mario, les CPE, la secrétaire et certains profs étaient des gens biens, même s’adapter à eux avait pu prendre un peu de temps.

 Et puis il se revoyait, lui : ado, quittant définitivement son collège, fonçant droit vers l’avenir, plein de rêves… Où donc tout ce temps était passé ? Et ses rêves ?

Anna, le tirant brusquement de sa rêverie par sa voix angoissée – Oh non…

Tony – Quoi ?

Anna – Ils se jettent de la farine et de l’eau ! Tu vas voir qu’on va en prendre plein la tête !

Tony, observant des élèves mettre le feu à une pile de carnets de correspondance – Pourquoi s’en prendraient-ils à nous ?

Anna – Florian et Fabien nous regardent en riant !...

Florian – Y’a pas de raison ! Vous nous avez cassé les couilles toute l’année alors on va s’amuser un peu avec vous !

Anna, indignée – Je t’ai donné du soutien toute l’année et tu me dis qu’on vous a…

Anna n’eu pas le temps de finir sa phrase qu’elle reçu, comme Tony, eau et farine dans des proportions invraisemblables. Des « hourra » retentirent et plusieurs élèves vinrent pour « achever les pions ». Mais c’était plus qu’il n’en fallait pour Tony qui attrapa Florian par la manche et le regarda droit dans les yeux :

Tony – Sale merdeux ! Tu te fous de qui ? Putain, je vais te… - Tony retint son poing à quelques centimètres du visage horrifié de Florian, sous les regards ahuris des élèves qui ne comprenaient pas pourquoi le pion ne jouait pas le jeu.

Anna, en pleurs – Je me casse ! J’en ai marre !...

Florian, paniqué – Me frappe pas Tony ! Je m’amuse !

Tony, relâchant sa proie – Casse-toi avant que je t’en colle une !

Ed, accompagné de Mario – On ferme le portail, Tony ! Les élèves qui sont au réfectoire sortiront par l’accueil !

Mario, regardant Fabien vite remis de sa frayeur – N’essaie même pas !

Ed – Ok ! Je vous préviens que le premier à tenter quoi que ce soit contre l’un de nous… je le massacre ! C’est clair pour tout le monde ?

Mario, à Tony – Allez, viens à la vie scolaire !

Tony, à ses comparses – Je ne comprends pas ! Si encore c’avait été Alexandre ou Johnny… mais je n’ai jamais eu de problème avec eux !

Mario – Tu vois bien qu’Anna avait de bons rapports avec Florian !

Tony, le regard dans le vide – Ben ouais…

Madame Sauzéon, avant même que les garçons n’entrent dans la vie scolaire – Anna nous a expliqué ce qui s’est passé, Tony ! Là, ça ne va pas se passer comme ça !

Tony – Ils ne reviennent plus de toute façon ! Qu’est-ce qu’on peut bien faire ?

Madame Sauzéon – Johanna est en train d’appeler chez les parents des deux élèves ! On les convoque : et s’ils ne se déplacent pas, on les menace de porter plainte à la gendarmerie !

Monsieur Dufour, sortant de la vie scolaire – Ah, Tony ! C’est bon ! On a réussi à joindre les parents des deux élèves ! Ils arrivent !

Tony – Ok ! Merci…

Monsieur Dufour – C’est la première fois que je vois ce genre de choses se produire en dix ans de métier !

Madame Sauzéon – Vous devriez aller vous rincer la figure, un peu…

Tony – J’y vais…

Mario, s’allumant une cloppe dans la cour – T’en veux une, avant d’aller te rincer ?

Tony – Euh… oui ! Merci ! Ca va me calmer !

Tony fuma sa cigarette et alla se rincer la tête dans les toilettes du personnel. Evidement, quelqu’un était passé par là juste avant et n’avait pas fermé la porte des WC. Quand le gars de l’accueil entra, il fut à la fois écœuré et montra un air suspicieux à l’endroit de Tony. Pauvre Tony : sa mésaventure ne lui avait pas ôté sa gêne maladive ! Quand il revint dans la cour, le père de Florian était aux prises avec Anna et monsieur Dufour.

Anna – Tu m’as mis de la farine sur un tailleur qui m’a couté très cher, je te ferai remarquer !

Florian, en pleurs – Je… je… suis désolé… mais on s’amusait…

Le père – Ecoutez mademoiselle : je vous propose d’envoyer vos habits au pressing et je règle la note ! Ca devrait réparer !

Monsieur Dufour – Alors écoutez, monsieur ! Moi je crois qu’il va en falloir un peu plus pour réparer ! Parce que ce qu’il a fait, s’apparente à une agression… et j’ai demandé au principal, monsieur Lagardère, un avertissement dossier !

Le père – Attendez ! Ca ne mérite quand même pas un avertissement dossier ! Ce n’est pas si grave tout de même !

Monsieur Dufour – Vous savez quoi ? Je n’en reviens pas de voir qu’un père se comporte comme son fils !

Le père – Comment ?

Monsieur Dufour – Depuis tout à l’heure vous cherchez à minimiser ce qu’a fait votre fils… alors je vais arrêter la discussion ici pour ne pas dire quelque chose que je pourrais regretter! Au revoir monsieur !

Le père, outré – Non mais ce n’est pas possible !

Tony, entrant dans l’arène – Mais vous vous attendiez à quoi ? Vous vous rendez compte de ce qu’il a fait ? Anna l’a aidé maintes fois à faire ses devoirs, elle a suivi ses résultats en classe… et moi, je n’ai jamais eu de problèmes particuliers avec Florian ! Alors qu’est-ce qui lui a pris de faire ce qu’il a fait ?

Le père – Il est désolé, vous savez ?

Tony, à Florian – Tu vois, Florian, je vais te parler franchement, devant ton père : j’ai faillit te mettre un coup de poing dans la figure ! Tu as eu de la chance que ma conscience soit plus forte que ma colère !

Le père, gêné – Je comprends… mais qu’est ce qui va arriver à Florian si jamais il a un avertissement dossier ? Parce que moi, vous comprenez, je l’ai inscrit dans un lycée très sélect et ils vont le refuser quand ils vont s’apercevoir qu’il a un avertissement dossier !

Anna, dégoutée – Ouais… la seule chose qui vous intéresse, c’est que votre fils n’ait pas d’avertissement ! Je préfère m’en aller… je vais au secrétariat, Tony !

Le père – Je comprends qu’elle soit vexée…

Tony – Non ! Vous ne comprenez pas parce que vous ne pensez qu’à votre fils ! En tout cas, je tiens à vous dire que je ne m’opposerai pas à l’avertissement dossier !

Le père – S’il vous plaît !...

Ed, sortant de la vie scolaire – Florian, qu’est-ce qu’il s’est passé après qu’on ait fermé le portail ?

Florian – Rien…

Ed – Ah oui ? Je viens d’avoir le principal au téléphone : les pompiers sont devant l’établissement ! Ils sont venus chercher un garçon qui a été molesté par deux collégiens qui l’ont arrosé avec de l’eau et de la farine en plus de l’avoir démolit!

 

 



27/03/2010
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