SEVICE PUBLIC

45. VOYAGE AU BOUT DE L’ENFER.





Olivia et Sofia n’en pouvaient plus de la permanence. Elles suppliaient Tony de leur trouver quelque chose à faire. Il leur demanda de l’aider à classer les billets d’absences qui s’étaient empilés pendant plusieurs semaines sans que personne ne les range.

Olivia – Oh merci Tony ! J’en pouvais plus de la perme !

Sofia – T’imagines ? Hier, on est resté six heures en perme ! A la fin, on savait plus quoi faire !

Ed, occupé à débuguer l’ordi de monsieur Dufour – Ouais… enfin : comme d’habitude !

Tony – Vous l’avez dit à vos parents ?

Olivia – Oui ! Mais ils veulent que je reste jusqu’à la fin !

Sofia – Moi pareil !

Tony – Bien… vous allez trouver le temps long jusqu’à jeudi !

Sofia – C’est qui qui fait la perme ?

Tony – Il y a longtemps qu’on ne me l’avait pas posée, celle-ci ! Anna…

Une gamine, entrant, accompagnée d’un « cas », dans la vie scolaire – Excusez moi…

Tony – Quoi ?...

La gamine – Ben… je viens de la part de la prof d’anglais…

Tony, las – Je suppose que tu accompagnes Olaf et non le contraire !

Olaf, la tête rentrée dans les épaules – Mais j’ai rien fait !

Tony – Arrête Olaf ! Le prof ne t’a pas viré pour rien quand même !

Olaf – Mais… si !

La gamine, visiblement satisfaite – Il fait que se curer le nez et il en met partout ! Et quand la prof lui a dit d’arrêter, il l’a traitée de pauvre fille !

Tony, sous les regards amusés de ses « auxiliaires » – C’est pas vrai Olaf ! Mais quand vas-tu arrêter de faire l’imbécile ?

Olaf – Mais j’ai rien dit !

Tony, agacé – Tu n’as rien dit, tu n’as rien fait ! Qu’est-ce qu’il est injuste votre prof !

Olaf, le regard fixé par terre – C’est pas un prof !

Tony – Quoi ? Comment ça ?

Olaf, toujours dans la même posture – C’est une prof ! T’as rien compris !

Tony, emporté – Mais qu’est-ce qu’on en a à foutre que ce soit un mec ou une femme ! Moi, ce que j’ai compris, c’est que tu as trouvé le moyen de te faire virer de cours trois jours avant la fin de l’année !

Olaf – Mais c’est bon !

Tony – Quoi « c’est bon » ? Non mais… - Prenant un instant sur lui – Allez, assieds-toi et attend les CPE ! Tu te débrouilleras avec eux !

Olaf, s’asseyant – Je m’en fous, moi !

Sofia, à Tony – Il est pas débile, lui ?

Tony – Non… c’est pas ça…

Madame Bretelle – Où sont les CPE ?

Tony, surpris – Bonjour… non, ils ne sont pas dans leurs bureaux !

Madame Bretelle – Et Edouard ?

Tony – Euh… il était dans le bureau de monsieur Dufour il y a deux minutes… - Après un regard – Il a du sortir par la porte de derrière.

Madame Bretelle – Oui ! Ils sont allés fumer, quoi ! Si tout le monde sort fumer, il n’y a plus moyen de faire quoi que ce soit !

Tony, soudainement énervé – Tout le monde n’est pas sorti puisque je suis là !

Madame Bretelle – Non mais vous savez très bien ce que je veux dire ! Si tout le monde part fumer en même temps, on ne trouve plus personne quand on a besoin de quelqu’un !

Tony – Ben tenez ! Les voici!

Madame Bretelle – Edouard ! Je peux vous parler ?

Ed – Ouais…

Madame Bretelle – Qu’est-ce qui s’est passé hier, en étude, avec Sony ?

Ed – Celui que j’ai viré ?

Madame Bretelle – Précisément !

Ed – Ben… il m’a cassé les berles et au bout d’un moment, je l’ai jeté de la perme !

Madame Bretelle – Vous avez une façon très particulière d’expliquer les choses, Edouard !

Ed, perplexe – Je ne sais pas trop quoi dire…

Madame Bretelle, impérieuse – Expliquez-moi correctement pourquoi vous l’avez évincé de l’étude !

Ed – Ok ! Je vais vous dire : il entre en étude en lançant son sac à dos en l’air ; il manque d’assommer une gamine, il se permet de dire à la gosse, qui lui dit de faire attention à ce qu’il fait, qu’il l’emmerde et qu’il va la taper…

Madame Bretelle – Enfin, moi il me semble que ce n’est pas à une élève d’intervenir !...

Ed – Ouais, enfin… j’y peux rien ! Il a manqué de l’assommer, elle lui a dit de faire attention ! Jusque là, il n’y a rien qui me traumatise !

Madame Bretelle – C’est facile… Quand vous commencerez à traiter les SEGPA comme les autres élèves…

Ed, l’interrompant – Mais c’est ce que je fais !

Madame Bretelle – Je ne vous permets pas de m’interrompre, et d’une ! Et de deux… - Un regard de colère sur Olivia et Sofia - Oh et puis on ne peut rien dire, il y a toujours des élèves dans cette vie scolaire ! Sortez et allez en étude ! Vous n’avez rien à faire ici !

Madame Sauzéon, qui assiste à l’altercation – Les surveillants les occupent parce qu’elles passent leurs journées en permanence et qu’elles n’ont rien à faire…

Madame Bretelle – On n’est pas là pour faire de l’animation ! Elles seraient des SEGPA, elles y resteraient en étude !

Tony – Hier j’ai pris deux sixièmes de SEGPA avec moi pour ranger la vie scolaire et ça c’est très bien passé !

Madame Bretelle – Vous ? Vous avez pris des SEGPA avec vous à la vie scolaire ?

Tony – Oui ! Les deux petits jumeaux !

Madame Bretelle – Ah… Oui, enfin : la vie scolaire, ce n’est pas leur place, je vous rappelle !

Tony – Quoi ?

Madame Bretelle – Eh oui ! C’est pas parce que vous faites n’importe quoi avec les élèves du collège que vous devez faire pareil avec ceux de SEGPA !

Ed – Bref ! Je l’ai viré parce qu’il m’a fait des menaces quand je lui ai dit que je ne voulais pas l’entendre !

Madame Bretelle – Je vous rappelle, Edouard, que vous n’avez pas à exclure un élève de permanence !

Ed – Et moi, je vous rappelle que je ne suis pas payé pour faire de la garderie : les profs décident de ne pas prendre les élèves sous prétexte qu’ils n’en ont pas beaucoup ou je ne sais plus trop quoi et nous, on se retrouve avec deux fois plus de permanences que d’ordinaire alors qu’on a tout un travail administratif à finir !

Madame Bretelle, contrariée – Bon, allez, j’ai compris ! On ne peut rien vous dire !

Ed, la regardant partir – Casse-toi, connasse !

Madame Sauzéon – Vous devriez essayer d’être un peu plus diplomate, Ed…

Ed – Mais qu’est-ce qu’elle vient me flétrir la tronche ! Elle n’est que directrice de SEGPA ! J’en ai rien à foutre d’elle, j’ai pas de compte à lui rendre !

Tony – C’est vrai qu’elle a toujours un reproche à nous faire !

Ed – Elle n’a qu’à se les coltiner ses monstres si elle ne veut pas qu’on les lui redresse ! Parce que, je suis désolé, mais il y en a un paquet qui sont tordus !

Tony – Y’a pas qu’en SEGPA…

Ed - …mais je sais ! Je ne vois pas pourquoi il faut toujours se justifier quand on émet des critiques à l’encontre des SEGPA ! Alors on a le droit de dire de n’importe qui qu’il pue des pieds mais pas d’un gamin qui appartient à une unité spécialisée : lui, il n’a pas pu se nettoyer les arpions, c’est différent ! Et même : il ne peut pas sentir le bouc puisqu’il est un damné ! Et malgré tout ça, note la pertinence : il faut les traiter comme les autres !

Tony, bouche bée - …

Ed – Faudrait arrêter de nous prendre pour des cons un peu ! Je n’ai peut être pas de concours de catégorie A mais je ne suis pas débile !

Tony – C’est sûr qu’elle nous dit de les traiter comme les autres et quand on le fait, elle considère qu’on les enfonce plus que de raison parce qu’ils sont de SEGPA ! On ne peut pas s’en sortir…

Ed, à nouveau joyeux – Ah ! Tu vois qu’elle est conne !

Tony – Ce n’est pas si simple…

Ed, très jovial – Un bon coup de queue, oui…

Les autres – Ohhh… Ed ! Arrête !

Ed – Mais si ! Un bon coup de queue !

 



17/04/2010
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